LES TEMOIGNAGES
« A travers la récolte on veut créer du lien, de l’échange, de la mixité »
Noémie MORTREU
25 ans
Porteuse du projet
FruitCollect
Fruit Collect s’est donné pour mission de sensibiliser sur l’importance d’une alimentation durable et locale, ainsi qu’à la lutte contre le gaspillage alimentaire. Ils organisent la récolte et la redistribution de fruits non-consommés des jardins de particuliers à des personnes dans le besoin.
https://fr-fr.facebook.com/fruitcollect/
Avec son projet Fruit Collect, Noémie répond à l’objectif de développement durable n°2
Dans quel état d’esprit étiez-vous en tant qu’étudiant concernant la société ? Concernant votre avenir ?
J’ai étudié pendant 5 ans la sociologie ; puis un diplôme complémentaire en gestion à l’ICHEC ; et à la sortie de mes études, je me suis directement engagé dans FruitCollect. Je constatais alors de fortes inégalités dans la société, le problème de l’alimentation, auquel j’ai été sensibilisé très jeune. J’ai voulu très vite sensibiliser mon entourage à ces valeurs et à l’alimentation durable. Le moyen de sensibilisation que je considère comme le plus efficace est par l’action concrète. Je suis quelqu’un d’assez engagée, chez les scouts et dans une association. Ma perception de la société est celle d’un manque cruel de liens entre les gens.
D’autre part, j’ai parmi mon entourage des personnes qui sont assez frileuses de s’engager dans les choses, on a l’impression que c’est un risque, mais je pense que ce qui est important en tant qu’étudiant, c’est aussi qu’on nous dise qu’il existe une alternative à la voie « classique » par l’engagement, pour un monde de demain plus juste. Ce besoin d’engagement et ma sensibilisation m’ont poussé à entreprendre.
Quels ont été vos premiers pas en tant qu’entrepreneur ? Vos premiers succès ? Vos principales difficultés ?
La facilité vient de la simplicité du projet, dans le sens où il parle à beaucoup, et il y a un potentiel énorme : il y a plein de jardins à Bruxelles, mais aussi dans le Brabant Wallon, la Wallonie et la Flandre qui restent avec des fruits non utilisés, donc il y a un potentiel énorme. A partir de cela, il y a une vraie opportunité de développer un discours de sensibilisation à l’utilisation des ressources locales notamment. Le projet a très vite parlé, notamment aux particuliers, que nous n’avons jamais contacté nous-même, c’est toujours eux qui sont venus vers nous, puis le transmettent autour d’eux par bouche à oreille. Beaucoup de personnes ont également souhaité s’engager en tant que récolteurs. Nous avons pour le moment plus ou moins 70 jardins de donneurs, et environ 150 à 200 personnes qui nous aident aux récoltes.
La difficulté principale du projet est un manque de temps : parmi ceux qui s’engagent, beaucoup ont une activité à côté. Mais en trois ans, il y a vraiment beaucoup de choses qui ont pu se mettre en place, et les périodes de récole ont été toujours plus fructueuses, mais l’évolution reste lente vu que peu de temps est dégagé pour. Je suis la première personne à m’engager à mi-temps, et je vais bientôt être rejoint par un personne à temps plein. Pour autant ces personnes restent bénévoles, vu le manque de financements. Seule la commune d’Etterbeek, que nous remercions, nous subsidient. C’est la présence de notre projet sur l’ensemble de la Belgique qui fait que nous ne rentrons parfois pas dans les cases pour recevoir un financement. C’est grâce la vente de jus et de confitures que nous savons rentrer dans nos frais.
Qu’est-ce qui vous a poussé à entreprendre dans le sociétal ?
Tout d’abord le besoin de m’engager dans un projet correspondant à mes valeurs, qui pour moi propose une solution simple : prendre des fruits là où il y en a et les distribuer là où il n’y en a pas. C’est donc le projet qui me plaisait, parce qu’il correspondait à mes valeurs et qu’il avait une visée sensibilisatrice assez importante pour moi. Ensuite, c’est le besoin de me confronter à de nouveaux challenges, mais également de me former sur plein de domaines, parce qu’au final être entrepreneur ça touche à beaucoup de choses concrètes en étant dans l’action. C’est aussi, bouger les choses à son échelle, pour faire en sorte que le monde de demain soit meilleur. C’est donner du temps pour quelque chose qui nous tient à cœur. C’est se créer son emploi idéal.
Dans quelle mesure voyez-vous votre projet entreprenariat comme une réponse aux défis écologiques et sociétaux qui se posent aujourd’hui ?
Sur deux plans.
D’une part sur le plan sociétal, étant donné que nous répondons à ce manque de lien social entre les gens, en mettant en lien des personnes dans le besoin et des personnes qui ont, mais aussi au moment des récoltes, quand on va chez les particuliers, on invite à ces récoltes notre base de données bénévoles. On invite à ces récoltes un public très large : il y a parfois des familles qui viennent nous aider, mais aussi des étudiants et parfois des personnes plus âgées. Nous mobilisons aussi plusieurs associations, qui nous permette de développer autour des récoltes des activités. A travers la récolte on veut créer du lien, de l’échange, de la mixité.
D’autre part sur le plan environnemental, dans le sens où il y a énormément de fruits et légumes qui sont importés, alors que l’on a plein de ressources locales inutilisées. Notre projet permet donc de revaloriser toutes les ressources qu’on a en Belgique, et de réduire le gâchis alimentaire. Cela vise finalement à réduire les inégalités, en rendant l’alimentation durable accessible à tous, et retrouver le plaisir du fruit. Nos produits sont distribués à des associations, à des restaurants sociaux et des épiceries sociales.
Quel conseil souhaitez-vous adresser à la nouvelle génération des aspirants entrepreneurs ?
Il ne faut pas hésiter à se lancer lorsqu’on a une idée en tête. Mais il faut tout de même faire attention à cette mode de se lancer dans l’entreprenariat social. Ce qui compte, ce n’est pas les mots que l’on utilise, c’est le fond, ce qui nous habite. C’est ça qui fait la force d’un projet !
*This publication has been produced with the assistance of the European Union. The contents of this publication are the sole responsibility of POSECO and can in no way be taken to reflect the views of the European Union or of ALDA.